Isabelle Blom – Kinésithérapeute                                                                                   Juin 2013

Depuis le début de notre formation RSP, nous avons dû accepter une succession de conventions afin de progresser et de pouvoir pratiquer. L’une d’entre elles m’a interpelée. Etant « Mézièriste » et « chainiste », j’aimerais comprendre les liens existants, au sein d’une COM (Chaine Organo Musculaire), entre l’organe, les différents muscles et les vertèbres en rapport.

J’adopte volontiers la relation « émotion-organe » dont les explications intuitives et/ou ancestrales d’André Perceval m’apparaissent cohérentes. Avancer que les organes ont une fonction physiologique et une fonction symbolico-émotionnelle est culotté mais pas inédit. Cela me parle bien. Au contraire, les relations qui unissent l’organe aux muscles et aux vertèbres ainsi que les muscles entre eux me laissent perplexe. Sans lien anatomique ni fonctionnel évident, la définition des COM repose sur l’observation.

Mais qu’y a-t-il derrière ? Le comprendre ne changerait pas notre pratique mais apporterait un peu de lumière…

  1. Ce que j’ai retenu de la théorie de Françoise Mézières (kinésithérapeute, professeur d’anatomie, fondatrice de la Méthode Mézières) issue de l’observation depuis les années 40, est que toutes les parties du corps sont inter dépendantes. Les lordoses sont prédominantes et les muscles fonctionnent en chaînes (elle en décrit 5). Ces dernières positionnent, si besoin, le corps dans une attitude qui permet d’éviter une « douleur occulte » inconsciente, cause de la douleur ressentie mais éloignée dans le temps et dans l’espace : « le mal n’est jamais là où il se manifeste ». Je crois que Mézières pensait en particulier à des sources post-traumatiques.

Les rétractions de ces chaînes sont à l’origine des déformations du squelette (cyphose, lordose, anté ou rétroversion du bassin, varus, varum, pieds versés…), des douleurs (musculaires, articulaires…) et de l’usure prématurée des articulations par déséquilibre articulaire (arthrose, pincements discaux…)

Autrement dit, le cerveau crée des mécanismes de protection inconscients assurés par les muscles, appelés « compensations ». Il convient, pour interrompre ces mécanismes et traiter ces douleurs, de considérer le corps dans sa globalité en mettant en place des postures d’étirement des chaînes musculaires hypertendues et de leurs aponévroses tout en libérant la respiration, le diaphragme étant un point clef central.

Ces postures tendent à rapprocher le sujet d’une position de référence. Ce qui est douloureux et difficile à réaliser mais puissant et peut amener, dans certains cas, à l’extériorisation de la douleur occulte. Théorie à laquelle j’adhère en grande partie, depuis mon adolescence, tant elle me parait logique. La relation inter-muscle s’explique par un besoin fonctionnel et physiologique d’évitement et la nécessité de conserver un état de confort physique.

Remarques :

– Je me suis longtemps demandé quelle était la nature de la douleur occulte. Aujourd’hui, par expérience, je pense que cette fameuse douleur peut avoir une origine viscérale, dentaire, post-traumatique (y compris naissance et chirurgie), neurologique ou émotionnelle. Elles peuvent aussi se cumuler.

– N’est-ce pas ainsi que fonctionne le psychisme ? Créer des mécanismes comportementaux compensatoires afin de cacher la souffrance psychique !

  1. La théorie de Godelieve Denys-Struyf (kinésithérapeute, ostéopathe, fondatrice de la Méthode GDS) basée sur l’observation également, est le lien entre le fonctionnement du corps et son attitude avec le comportement psychologique de la personne.

Depuis les années 60, elle a mis en évidence des familles de muscles, outils de l’expression psychocorporelle. Comme pour Mézières, le corps forme une unité dont toutes les parties sont reliées entre elles par des chaînes musculaires et leurs enveloppes. « Nos émotions, nos sentiments, notre manière d’être et notre vécu s’expriment au travers de ce système qui influence nos gestes et notre posture et nous situe dans une communication non verbale avec l’environnement : c’est ce que nous appelons le langage parlé du corps.

Les familles musculaires, quand elles sont souples et bien accordées, assurent notre unité et notre adaptabilité pour faire face aux nécessités de la vie. Dans l’excès, ces familles peuvent devenir chaînes de tension myo-fasciales emprisonnant le corps dans une attitude rigidifiée.

Ce phénomène, lorsqu’il se répète et se prolonge dans le temps, marque le corps d’empreintes spécifiques et détermine de manière progressive une cascade de dysfonctions articulaires. »

Denys-Struyf décrit ainsi six « chaînes comportementales » mises en tension par un besoin inconscient de traduire l’état émotionnel (la cérébralité, l’impulsivité, la réceptivité, l’émotivité, l’affectivité, l’extraversion et l’introversion). Théorie que je trouve séduisante tan t la relation corps-esprit m’apparait évidente en tant que « RSPtiste ». Elle ouvre une voie vers les thérapies somato-psychiques.

Remarque :

N’est-ce pas similaire à l’étude du fonctionnement des muscles de la face par les physionomistes ? Ne parle-t-on pas d’un visage épanouie ou  rembrunie,  expressif ou éteint, marqué ou détendu ?

  1. Léopold Busquet (kinésithérapeute, ex-mézièriste, ostéopathe, fondateur des Chaînes Physiologiques) ne parle pas d’émotion mais a approfondi les recherches de Françoise Mézières, depuis les années 90, décelant une relation existante entre les organes et les chaînes musculaires.

Il confirme la notion de globalité du corps et découvre qu’un organe qui « gonfle » (congestion, gaz, fibrome, tumeur…) entraine un besoin de place et une « surprogrammation » des chaînes musculaires qui lui permettront ce gain de place, en général les chaînes d’extension et d’ouverture. Alors qu’un organe qui se « rétracte » ou un « point de fixation tissulaire » (spasme, adhérence, cicatrice…) nécessite une attirance des tissus vers ce point et une « surprogrammation » des chaînes qui lui donneront du mou, en général les chaînes de flexion et de fermeture. Ce qui valide la mise en place de mécanismes de protection, à partir d’une douleur cachée, qu’avait imaginé Mézières. Son expérience l’a amené à dire qu’au moins 70% des compensations du corps sont d’origine viscérale.

Il définit ainsi 5 chaînes musculaires, anatomiquement, très cohérentes s’étendant de l’intérieur du crâne jusqu’aux pieds, ainsi que deux autres chaînes viscérale et neuroméningée.

Les conséquences de la douleur cachée sont bien : les douleurs perçues, les déformations du squelette, les déséquilibres articulaires et leurs séquelles. Exemples : la lordose d’origine intestinale (congestion, gaz…), la cyphose d’origine spasmodique, la scoliose d’origine hépatique, gastrique ou cardiaque, le genu valgum + hallux valgus de l’utérus congestionné…

Un lien mécanique est ainsi « débusqué » entre les organes, les muscles, la statique et les articulations : la relation contenant-contenu.

Remarque :

Il est tentant de faire le rapprochement entre le « bon vivant »  de Busquet, tout congestionné, lordosé, le bassin antéversé (+/- en ouverture) et le thorax déployé, avec « l’impulsif » et « l’extraverti » de Denys-Struyf. De même que le « replié sur soi » de Busquet, blindé de spasmes intestinaux, de rétractions d’abdominaux se tenant en cyphose, rétroversion du bassin (+/- fermeture thorax et bassin) ressemble à « l’introverti » et « l’affectif » de Denys-Struyf. Ces rapprochements nous emmènent sur la voie de la relation organe – muscles – émotion. 

  1. En RSP (conceptualisée par André Perceval), nous utilisons les chaînes organo-musculaires (COM) définies par la Microkinésithérapie. Après avoir constaté que les COM allaient du haut vers le bas du corps avec un lien topographique approximatif entre les muscles, les vertèbres et l’organe en question, je me demande pourquoi V2 (gros intestin) est si haut placé au niveau vertébral par rapport à l’organe, V12 (pancréas) si bas et V11 (vésicule biliaire) si éloignée de V8 (foie) ! Alors, je replonge dans mes cours et essaie de prendre de la hauteur pour avoir une vue d’ensemble. Je reviens sur le cours d’embryologie…

          A – Je constate que les vaisseaux (V1) étaient les premiers arrivés, à J17 – J18, pour permettre la vie de chaque nouvelle cellule.

Au cours de la 4ième semaine, la première formation organique évoquée est le tube intestinal (qui est à l’origine de tous les viscères abdominaux) à J22, on a envie de penser à … V2. Ensuite on parle de l’ébauche du cœur (V3) à J22 et du développement des bourgeons pulmonaires et bronchiques (V4-V5) à J26. Et ainsi de suite de la 4ième à la 8ième semaine, période à laquelle se déroule l’organogénèse. Je ne dispose pas de moyens suffisants pour réaliser cette étude mais il semble qu’elle serait intéressante à faire. L’idée est de vérifier s’il pourrait exister un ordre chronologique d’émergence des différents organes correspondant à l’ordre des COM.

          B – Sachant que les somites sont à l’origine du squelette axial (colonne vertébrale + partie de l’occiput), de la musculature volontaire (cou, tronc, membres) et d’une partie du derme (tronc, cou), on remarque que les premiers somites apparaissent à J20 (future base du crâne) et qu’ils apparaissent au niveau vertébral… de l’occiput vers le coccyx… dès la 4ième semaine !

La deuxième idée serait de reconsidérer l’embryologie d’une autre manière : en classant, pour chaque jour et chaque heure, toutes les genèses organiques (endoblaste), musculo-vertébrales (mésoblaste) et pourquoi pas des tissus nerveux (ectoblaste) afin de vérifier si leurs apparitions coïncident avec la classification proposée par les COM. Ce qui nous permettrait, peut-être, de déceler une raison d’être logique  de chaque COM… et de comprendre le lien qui uni la sphère crânienne à la sphère pelvienne (CR1 avec BA1 BA2, CR2 avec BA3 BA4 et CR3 avec BA5 BA6). Et si c’était une histoire de synchronicité ?

          C – Si le lien entre l’organe, ses muscles et ses vertèbres était, simplement, le moment M (l’heure ou la minute) de leur création, l’instant où les vibrations nécessaires à la formation des premières molécules de chaque élément se font sentir… A cet instant correspondrait, aussi, un état énergétique influent, défini par toutes les vibrations environnantes : maternelles, familiales, naturelles, électromagnétiques, climatiques…cosmiques !

La « mémoire » de cette résultante énergétique, à cet instant, créerait le lien pour la vie entre l’organe, les muscles et les vertèbres de la COM. Serait-il possible, alors, d’expliquer que lorsque l’un des éléments de la COM souffre, les autres s’en trouvent énergétiquement perturbés ? Si la COM apparait lors de mauvaises conditions vibratoires environnantes, serait-elle fragilisée, à jamais, dans son anatomie, sa physiologie, son énergie ? Enfin, devons-nous ajouter à ces composantes temporelle et énergétique la notion de lieu ?

Remarque :

En Astrologie, on considère la position des planètes au moment de la naissance (jour, heure, minute) et le lieu de naissance. L’étude des influences astrales détermine les tendances psychologiques et comportementales des êtres humains, pour la vie.

         La RSP nous transporte dans cette autre dimension : le monde de la mémoire énergétique. Elle nous permet de percevoir les perturbations vibratoires des COM et d’en décoder précisément le « message émotionnel ». Ces perturbations fragilisent la COM dans sa totalité. Cela peut se traduire par des douleurs ou des dysfonctionnements des différents éléments de la COM et aboutir à la création de …douleurs occultes… et de mécanismes de compensation.

Léo Busquet a constaté que 70% des maux sont d’origine viscérale ; Percy, que 70% des maux sont d’origine émotionnelle.

Quelle coïncidence !

Cela voudrait dire qu’un individu subit, à la fois, les dysfonctionnements organo-musculaires de ses COM et ceux liés aux compensations mises en place. Voilà de quoi compliquer le travail des chercheurs en Microkinésithérapie ainsi que le nôtre en tant que thérapeutes manuels.

Par un rééquilibrage énergétique des COM, la RSP permet de désamorcer le problème à sa source et donne une solution de traitement des sujets récalcitrants aux thérapies mécaniques.