Pascale Dulout – Ostéopathe

  1. Physiologie du toucher (somesthésie)

11 – Organogénèse 

            Le toucher est le premier des cinq sens à se développer chez l’embryon humain. Les structures anatomiques périphériques apparaissent entre la 9ème et la 20ème semaine d’aménorrhée et l’on observe des réponses physiologiques et/ou comportementales sur tout le corps dès la 14ème semaine alors que l’on n’observe des réponses liées à la stimulation des autres sens qu’à partir de la 25ème semaine.

Cette précocité indique l’importance de la somesthésie dans le développement du fœtus. C’est le premier sens qui lui permet d’appréhender son environnement proche, son propre corps, sa position dans l’espace… donc qui lui permet de prendre conscience de lui et de sa position. Dans l’utérus, dès la fin du premier trimestre, le fœtus ressent déjà les parois utérines contre l’ensemble de son corps, ce qui va participer à la définition de ses contours. Il ressent ses mains ou ses doigts venant au contact de son visage ou de sa bouche. Il est aussi capable de percevoir les mouvements du liquide induits par les mouvements de sa mère…

Les premières informations lui indiquant son existence, lui permettant de commencer à se définir sont tactiles !

12 – Les voies nerveuses

            La somesthésie est un sens qui englobe trois types de sensibilités différentes :

– La sensibilité extéroceptive, c’est la sensibilité des téguments, de tout ce qui est originaire de l’ectoderme. Elle se divise en trois composantes, le tact épicritique, tact fin et très différencié ; le tact protopathique, tact grossier non discriminatif et la sensibilité thermoalgique, sensations thermiques ou douloureuses (sensibilité extéroceptive protopathique également).

– La sensibilité proprioceptive, originaire du mésoderme, concerne des informations dont les récepteurs sont situés dans les tendons, les aponévroses, les ligaments… On distingue la proprioception consciente, qui renseigne sur la position des membres dans l’espace et la sensibilité proprioceptive inconsciente qui concerne le tonus du tronc en particulier et des membres.

– La sensibilité intéroceptive véhicule toutes les informations issues des viscères et de l’endoderme.

Nous allons nous intéresser essentiellement à la sensibilité extéroceptive ou « toucher ».

Il existe différentes voies nerveuses et différents récepteurs qui permettent de capter et véhiculer les informations tactiles.

13 – Les récepteurs :

            Un premier type de récepteur, les disques de Merkel, situés superficiellement au niveau de l’épiderme et densément présents au niveau des doigts et des lèvres, répondent à des pressions légères. Ils permettent de discriminer les bords et la forme d’un objet (tact statique).

            Un deuxième type de récepteur, les corpuscules de Meissner, également situés dans la couche superficielle de la peau et aussi très nombreux au niveau des doigts et des lèvres, sont sensibles à des pressions minimes de la peau, des mouvements légers de surface, des vibrations lentes (tact dynamique).

            Au niveau du derme et de l’hypoderme, se trouve un autre type de récepteur, les Corpuscules de Pacini. Ils répondent à des vibrations profondes, à des étirements et à la pression profonde.

            Un quatrième type de récepteur, les Corpuscules de Ruffini, situés aussi dans le derme et l’hypoderme, répondent aux étirements persistants que produisent les mouvements des différents segments du corps.

            Les Corpuscules de Krause, situés dans les couches superficielles et profondes, dans tout le corps mais plus densément au niveau des doigts et des lèvres, sont sensibles au froid et au chaud (thermoception).

            Dans tout le corps et en particulier dans la peau, des terminaisons libres réagissent aux agressions mécaniques et chimiques, ce sont les récepteurs de la nociception.

            Enfin, les récepteurs des follicules pileux, des terminaisons libres qui se situent autour de la racine du poil et sous les glandes sébacées, nous informent du mouvement des poils (caresse).

            La diversité des récepteurs sensoriels au niveau de la peau indique la grande richesse des informations véhiculées à partir de notre enveloppe cutanée. Ces informations permettent une définition tout aussi riche et extrêmement précise de notre environnement, des objets, des personnes avec lequel le corps interagit. Il est intéressant de noter que le sens du toucher est inévitablement réciproque, c’est-à-dire que nous ne pouvons pas toucher sans être touché.

14 – Les voies nerveuses des afférences somesthésiques extéroceptives :

            Le message recueilli par les récepteurs que nous venons de voir est ensuite véhiculé vers le cortex somato-sensoriel via trois types de fibres nerveuses de plus ou moins gros diamètre, myélinisées ou non.

Les fibres A-bêta : ce sont des fibres de gros diamètre, myélinisées. De ce fait, elles sont dites rapides. Elles conduisent les messages issus des quatre types de mécanorécepteurs de la peau et nous informent sur la discrimination tactile statique et dynamique, sur les pressions, les vibrations et les étirements.

Les fibres A-delta : elles sont d’un diamètre inférieur à celui des fibres A-bêta et moins myélinisées, donc moins rapides. Leurs terminaisons libres collectent des informations nociceptives de type piqûre et sur le toucher léger superficiel (insecte rampant sur la peau.

Les fibres C : ce sont les plus petites et ne sont pas myélinisées ; ce sont donc les fibres les plus lentes. Elles aussi, possèdent des terminaisons libres sensibles aux stimulations thermiques non algiques et aux mouvements agréables des poils courts (caresses).  

Les fibres A-delta et C ont aussi la charge de recevoir et transmettre les messages douloureux.

Deux voies afférentes véhiculent ensuite le message jusqu’au cortex somato-sensoriel.

141 – La voie de la sensibilité extéroceptive épicritique : Cordonale postérieure (anciennement lemniscale) :

La sensibilité extéroceptive épicritique est parfaitement consciente, précise et discriminative. Cette voie est constituée par les fibres A-bêta, elle monte homolatéralement dans les cordons postérieurs de la moëlle via les faisceaux de Goll et Burdach jusqu’aux noyaux du même nom au niveau du bulbe rachidien. Dans les noyaux du bulbe rachidien, les fibres A-bêta font synapse avec un deuxième neurone qui va croiser la ligne médiane et rejoindre le thalamus, puis un troisième neurone achemine le message vers le cortex somato-sensoriel au niveau du lobe pariétal.

142 – La voie de la sensibilité extéroceptive protopathique (ex extra-lemniscale) :

C’est une sensibilité mal limitée (tact grossier, température, douleur), discrète mais consciente. Les fibres A-delta et C gagnent la moëlle épinière où elles font synapse avec un deuxième neurone qui va décusser à chaque niveau métamérique et rejoindre le bulbe rachidien par le cordon antéro-latéral de la moëlle. La deuxième synapse se trouve au niveau du thalamus avec le troisième neurone qui gagne le cortex somesthésique. Il existe une différence entre les fibres A-delta qui se projettent de façon somatotopique au niveau du thalamus, ce qui n’est pas le cas pour les fibres C. De ce fait, la sensation véhiculée par ce faisceau est sourde, mal systématisée et non discriminative. Cette voie serait à l’origine de la « mise en éveil » du système nerveux central (alerte, défense). Ces informations sont largement diffusées à de nombreuses régions cérébrales et participent aux composantes émotionnelles, cognitives et affectives de l’information somesthésique ainsi qu’à des modifications végétatives.

La sensation captée par le récepteur ne devient perception que grâce aux nombreuses interactions des informations reçues et stockées dans le cerveau, avec un passage systématique dans le thalamus (pour toutes les afférences sensitives excepté les afférences olfactives). Le thalamus est un gros noyau de la base du cerveau lié au système limbique.

Ainsi toute perception crée une émotion qui s’inscrit dans notre mémoire. De toutes ces interactions entre les aires corticales qui ont pour chef d’orchestre l’aire préfrontale, découle notre présence au monde !

2- Construction de l’image du monde et de soi 

            Nous venons de voir que notre « conscience de soi » nait de l’interaction des nombreuses informations sensorielles que nous expérimentons. Parmi ces informations sensorielles nous avons vu précédemment que le sens du toucher est présent et mature précocement au cours de la vie intra-utérine. De nombreux travaux ont mis en avant l’importance du toucher sur le développement des nouveau-nés.

21 – Carences de toucher

Il a été mis en évidence, au milieu du siècle dernier (Harlow 1958), que des enfants élevés en institution, sans contact affectueux de la part des adultes responsables de leurs soins présentaient de nombreux troubles du développement physique, psychique et comportemental.

Ces enfants ne grandissaient pas correctement malgré des apports alimentaires adaptés, leur système immunitaire était défaillant. Le développement psychomoteur et intellectuel était aussi retardé et perturbé. Ils étaient tristes, souffraient d’inhibition motrice ou d’agitation, faisaient preuve d’auto-agressivité, de balancements compulsifs (hospitalisme). Aussi, la privation de stimuli somesthésiques à caractère hédonique provoquerait, directement ou indirectement, des effets comportementaux et sociaux négatifs (Field 1995). Un tiers de ces enfants ne survivaient pas.

Ces nourrissons privés précocement du contact bienveillant de leur mère ne se sont pas « construits » harmonieusement.

22 – Les stimulations tactiles précoces         

La physiologie du système sensoriel somesthésique, sa maturation précoce au cours du développement, permet au fœtus puis au nouveau-né, d’avoir des informations tactiles sur son environnement proche et son propre corps.

In utero, le fœtus perçoit dès la fin du 1er trimestre sur l’ensemble de son corps, les mouvements du liquide amniotique. Il peut percevoir aussi le contact avec l’utérus de sa mère. Il va rapidement être capable de porter ses mains à son visage. Puis au fur et à mesure que la grossesse avance, sa croissance va l’amener à être entièrement enveloppé dans l’utérus.

Au moment de la naissance, la longue phase de travail s’apparenterait au léchage des autres mammifères. Les contractions utérines stimulent la peau du fœtus ce qui déclencherait l’activité des systèmes vitaux pour la vie extra-utérine. Ces systèmes vitaux sont les systèmes respiratoire, circulatoire, digestif, d’élimination, nerveux et endocrinien.

Après la naissance, le développement du nouveau-né nécessite des soins répétés. Les interactions avec sa mère ou son entourage maternant sont réciproques et lui permettent d’agir sur son environnement, de répondre à ses besoins. Lors des soins, le bébé fait de multiples expériences d’enveloppement, de bercement, de frottements, de pressions, de température, de caresses… Lors de la tétée, le bébé expérimente par sa bouche, l’incorporation et la sensation de réplétion. Ces activités de la vie quotidienne permettent à l’enfant de prendre conscience de ses contours, et de distinguer l’intérieur et l’extérieur de son corps. D’abord stimulation involontaire de la peau, les soins deviennent progressivement des jeux volontaires, des plaisirs que le bébé reçoit dans un premier temps comme une excitation, puis petit à petit comme une communication : « le massage devient message ».

Il convient alors de s’intéresser à la qualité du toucher.

23 – Le toucher, un mode de communication

Pendant la grossesse, le fœtus reçoit un massage continu par le liquide amniotique, les viscères et les mouvements de sa mère. Selon les états d’être de la maman, le massage va être doux et fluide ou plus tonique et saccadé : il s’agit du premier dialogue mère-enfant. Winnicott évoque l’importance de la qualité des soins maternels (« une mère suffisamment bonne ») dans l’instauration du lien mère-enfant/monde extérieur-enfant.

Le « holding » désigne l’ensemble des soins donnés à l’enfant par la mère dans sa capacité à contenir ses angoisses à la fois sur le plan physique (portage, bercement) et psychique (capacité à penser les émotions de son enfant). Le « handling » renvoie à une dimension plus pratique, il correspond aux soins quotidiens prodigués à l’enfant (toilette, change, habillage…) tout en entretenant un échange affectif et émotionnel lors du soin. Il permet au bébé de se constituer une enveloppe (peau selon Anzieu) sur laquelle va s’étayer la constitution de son moi. Là encore, à travers ces contacts, l’enfant ressent les états d’âme de la maman et lui communique aussi corporellement les siens. C’est par cette relation inter corporelle, à travers ses sensations, que l’enfant appréhende le monde de l’autre et le monde extérieur.

24 – La découverte de soi et du monde

C’est d’abord à travers son expérience tactile que l’enfant se découvre et découvre le monde environnant. Notre sens de la réalité est basé sur le toucher puisque nous ne croyons à la réalité d’une chose que lorsque nous la touchons du doigt. Tout ce que les autres sens nous font percevoir de la réalité n’est qu’une hypothèse à vérifier par le toucher. C’est par sa peau et les sensations qu’elle lui procure que l’enfant parviendra à établir des relations avec le monde environnant. A travers la preuve tangible du corps de sa mère dans les soins qu’elle lui prodigue, l’enfant va prendre conscience de son propre corps. L’éveil de la conscience de soi est en grande partie une question d’expériences tactiles.

Grâce à sa bouche dans un premier temps puis rapidement avec ses mains le nourrisson s’explore et explore le monde physique par le toucher et apprend les nombreuses caractéristiques qu’il offre, notamment la forme, la surface, la résistance, l’élasticité, la texture… Les autres sens sont si peu développés à la naissance qu’ils ne lui fournissent que peu d’information de valeur. L’enfant différencie progressivement le toucher des autres sens et devient capable de distinguer et reconnaître les différents objets sans n’avoir plus besoin de les toucher. Il construit la réalité du monde extérieur, les images qui en émergent à partir de tous ses sens, mais toujours avec la suprématie du toucher qui évalue, classe et met ces sensations en relation les unes avec les autres.

Bien qu’il n’en soit pas une, le toucher tout comme les émotions, modifie l’équilibre nerveux, hormonal, musculaire et mental. La qualité des soins prodigués au bébé, les caresses de la petite enfance permettent la construction d’une image positive de soi-même en nourrissant le sentiment d’être accepté et aimé. Cet univers du toucher chez l’enfant le fait exister en tant qu’individu, le sécurise et lui donne envie de prendre le risque de s’ouvrir aux situations nouvelles. Les stimulations cutanées précoces semblent avoir une incidence à long terme sur le développement physique et émotionnel et affectif de l’enfant puis de l’adulte.

3 – Rôle du toucher dans le bien-être et l’estime de soi

31 – Impact du toucher sur la douleur

            La douleur est une modalité sensorielle somesthésique. Nous avons vu que les messages douloureux sont véhiculés par deux types de fibres, les fibres A-delta et C. Ces fibres établissent un relais dans la corne postérieure de la moëlle épinière avec un deuxième neurone. A ce niveau, il existe des interneurones inhibiteurs provenant des fibres A-bêta. Cet interneurone est capable d’interférer, en l’annulant ou le diminuant, sur le message transmis par les fibres nociceptives lorsque les fibres A-bêta sont stimulées en même temps. C’est la théorie du Gate control, qui permet d’expliquer qu’une friction après s’être cogné, diminue la sensation douloureuse, elle explique aussi une partie de l’efficacité antalgique du massage. Cette théorie ne s’expliquerait pas uniquement par un phénomène d’inhibition neuronale de la stimulation nociceptive par la stimulation tactile, mais aussi par la sécrétion au niveau de la corne postérieure de sérotonine ayant un effet antalgique

            Au-delà de cette modulation spinale de la douleur, le toucher permet de mettre en jeu une modulation centrale descendante du message nociceptif. Les voies nociceptives se projettent dans quatre sites différents au niveau de l’encéphale :

            -le thalamus, avec une organisation somatotopique, produisant la composante sensori-discriminative de la douleur ;             -le bulbe : la stimulation douloureuse provoque une réaction d’alerte au niveau des centres cardio-respiratoires, d’éveil, des réactions motrices, émotionnelles et comportementales.             -l’hypothalamus qui participe aux réactions végétatives de la douleur, notamment à la libération d’hormones du stress.             -l’amygdale, structure du système limbique, intervient dans les réponses comportementales et végétatives de la douleur, en particulier dans la peur.

Or, toutes les afférences somesthésiques transitent par les noyaux du thalamus, structure en lien avec le système limbique. Le massage, un contact bienveillant, un câlin stimulent aussi la production d’hormones, les endorphines, au niveau de notre cerveau, qui vont permettre d’atténuer la sensation douloureuse. Ils favorisent aussi la sécrétion d’ocytocines, hormones du lien, qui confèrent un sentiment de sécurité et permettent de moduler les réactions mises en jeu par le message nociceptif.

32 – Impact du toucher sur le bien-être

            Bien-être : « Etat agréable résultant de la satisfaction des besoins du corps et du calme de l’esprit »

Dans cette définition, il apparait que le bien-être a une composante physique et une composante psychique et émotionnelle.

On pense forcément aux massages dès que l’on parle de bien-être. Masser vient du verbe arabe « mass » qui signifie « toucher ». Un massage vise à obtenir un état de détente musculaire, un moment d’abandon où l’on se remet aux mains de l’autre, le sentiment d’être « bien dans sa peau ». Dans certaines cultures, le massage est utilisé pour harmoniser la circulation des énergies. Effleurer, toucher, caresser la peau libère des hormones décontractantes, stimulantes ou euphorisantes. Il s’agit des hormones du bonheur que sont :

-la dopamine, qui accentue l’envie d’agir ; -les endorphines qui masquent la douleur pendant un court moment ; -l’ocytocine, qui est l’hormone du lien social, de l’amour, de la confiance en l’autre ; -la sérotonine, hormone du respect d’autrui, de la paix, elle est liée au sommeil ;

Et le toucher réduit la production de cortisol, hormone du stress.

En dehors du massage, dans les relations familières bienveillantes, une main peut accueillir, apaiser, réchauffer, contenir, soulager, soutenir, accompagner, réconforter… Les échanges tactiles sont très puissants car ils expriment les émotions et ressentis inconscients. C’est aussi par des contacts, des étreintes que l’on partage nos plus grandes joies.

Nombre d’études ont évalué les effets bénéfiques du toucher, notamment chez les enfants, nouveau-nés prématurés, personnes en situation de soins, les adultes, les femmes enceintes, les personnes âgées…

Chez les nouveau-nés prématurés il est observé une meilleure prise de poids (pour une même quantité de lait), un raccourcissement de la durée d’alimentation parentérale, moins de signaux de stress, un temps d’éveil calme plus long, un raccourcissement de la durée d’hospitalisation, une meilleure maturation cérébrale, une meilleure acuité visuelle… Le massage des nouveau-nés prématurés par leur maman diminue les risques de dépression post-natale chez la mère.

Chez des enfants autistes, et chez des enfants hyperactifs des massages réguliers ont permis de diminuer les comportements perturbateurs en classe, d’améliorer les interactions avec le professeur, une amélioration de la qualité du sommeil. Une diminution des symptômes de dépression et d’anxiété, une baisse du cortisol, de meilleures habitudes alimentaires et une expression de l’image de soi plus réaliste apparaissent après un mois de massage pour des jeunes adultes boulimiques et anorexiques.

Chez des patients hospitalisés pour le traitement d’une leucémie on observe une baisse importante du niveau d’anxiété par rapport aux patients qui n’ont bénéficié que d’un temps de repos.  Quinze minutes de massage par jours chez des adultes entrainent un renforcement de l’attention et de la concentration (EEG), une diminution du stress (moins de cortisol), de meilleures performances cognitives (rapidité et précision pour le calcul), un meilleur esprit d’équipe, plus d’attention, de créativité, de motivation, moins d’absentéisme, moins de fatigue chronique…

Des femmes enceintes massées régulièrement ont eu des accouchements plus rapides, moins douloureux, et moins de césariennes. Dans des situations de soins douloureuses et invasives, le toucher diminue significativement la douleur et l’anxiété.

33 – Impact du toucher sur l’estime de soi

            Le bon développement de l’enfant, la construction d’une image positive de soi associée au sentiment d’être accepté et aimé sont conditionnés selon Winnicott à la qualité des soins, aux caresses prodigués à l’enfant.

            Plusieurs auteurs (Howard, 1988 ; Lane, 1989 ; McCloskey et Bulecheck, 1996 ; Montagu, 1979 ; Pepin, 1996) affirment que le toucher affectif est un outil puissant de communication pouvant modifier le comportement et l’état affectif d’un individu, notamment les patients de gériatrie qui se comportent plus aimablement lorsque le toucher est une technique de base. Le toucher transmet l’acceptation et l’empathie, rassure.

Une expérimentation chez des sujets âgés institutionnalisés a montré que le toucher affectif répété est vécu comme une marque d’affection, d’amour, de considération (on tient compte de moi). Il apporte de la joie, de la bonne humeur, de la sécurité, du bien-être et un sentiment d’importance.

34 – L’auto toucher pour la RSP…

Chantal Chawaf dans « Te caresser m’ouvre les mains » écrit :

« Les mains nourrissent notre faim de présence où s’altère notre désir d’être. »

Dans notre société ou la culture est empreinte de morale judéo-chrétienne, la place du toucher est très réduite car essentiellement associé à la sexualité. C’est un des meilleurs moyens de communiquer la tendresse et l’amour.

L’essentiel des études sur le toucher portent sur le toucher par l’autre, dans sa composante de rencontre, de communication, d’échange… Toutefois la plupart de ces observations peuvent être vraies dans le cas d’auto toucher si le sujet porte une attention juste et bienveillante aux sensations qu’il perçoit. Il va à la fois sentir qu’il touche et qu’il est touché, le système sensoriel et toutes les interactions dans les différentes zones du cerveau peuvent être mises en œuvre.

La construction des représentations se fait en premier lieu grâce aux informations somesthésiques, puis les informations des autres sens sont intégrées si bien que le relais de la peau n’est plus nécessaire pour reconnaitre l’image constituée.

Lorsque le sujet présente une déficience de l’élément feu en RSP, il ne se reconnait pas, ne s’aime pas ; il est alors nécessaire de (re)constituer une image de lui en réalisant, en conscience, certains soins lors de la toilette (savonnage, gommage, hydratation, sensation de l’eau qui coule sur le corps…) et /ou des automassages. Être attentif aux sensations procurées par ces contacts bienveillants va permettre d’intégrer progressivement ses limites et contours, la densité des tissus, les tensions musculaires, la souplesse et la qualité de la peau, toutes les singularités physiques afin de connaître et d’accepter toutes les parties de soi. La peau, par son grain, sa texture présente des différences individuelles considérables. Se familiariser avec, va assurer une fonction d’individuation qui apporte le sentiment d’être un être unique.

Ces exercices quotidiens vont déclencher les réactions mécaniques, hormonales et émotionnelles conduisant au bien-être, à l’envie d’avancer, à la sécurité ce qui va permettre de diminuer l’anxiété, les douleurs éventuelles, nourrir le sentiment d’amour de soi, de reconnaissance et d’estime de soi.

La caresse est à la main ce que le sourire est au visage.